Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/145

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temps d’un Pater et aussi d’un De Profundis pour ses défunts. Et la nette bonne femme, en règle avec Dieu par cette politesse et avec ses morts par ce souvenir, S’agrippe à sa chaise pour se remettre debout. Dieu, elle n’a pas besoin de longues formules pour le saluer le soir. Familière avec lui, ce n’est pas souvent que, dans sa solitude, elle perd le sentiment de sa présence. Elle s’écrie à tout moment : « Mon Dieu ! Mon Dieu ! » Du point de vue de la syntaxe même, il y a dans son idée non pas interjection, mais vocatif, c’est-à-dire prière, demande de secours, ou respectueux reproche : « Est-ce que je n’ai pas assez souffert toute ma vie pour que ces rhumatismes me tiraillent encore ! » Ou bien : « Mon Dieu ! que mes reins me font mal ! » Les gens de la ville souriraient. « Qu’est-ce que cette vieille peut bien concevoir de l’infini de Dieu ! »

Mais, gens de la ville, qu’est-ce que vous en concevez vous-mêmes ?

À ce moment, il s’agit moins pour la Marie de se dévêtir que de s’habiller en vue de la nuit. Elle se couvre de lainages et de linge bien frais. Un bonnet blanc enserre ses cheveux, une camisole à petits plis cache son gros gilet quand, péniblement, par ce soir d’hiver elle se hisse sur le catafalque où elle va s’étendre. Il n’est que