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Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/180

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tance du présent, et celui de Camille était d’une assez belle qualité pour qu’elle ignorât alors systématiquement l’avenir.

Prosper était l’amour même. Il s’effondrait de reconnaissance aux pieds de son idole. Car enfin, c’est elle qui avait voulu hâter le mariage alors que lui parlait de temporiser, d’attendre la fin de sa convalescence, de gagner ainsi l’année prochaine.

« L’année prochaine ! hélas !… » avait pensé Camille.

Il désira se peser. La tendre Camille le détourna de ce dessein, tenant à lui cacher les signes de son dépérissement. Elle ne l’empêcha pas de se rendre en cachette chez son pharmacien et d’y cueillir, sur un carton rose, la preuve qu’il avait engraissé de cinq kilos. Le spécialiste, averti, eut un sourire sardonique. Il resta muet. Il savait depuis longtemps que ces appareils d’officine fonctionnaient mal. Pour Camille, elle crut sentir se détendre un peu l’étau dans lequel elle jouissait de l’existence.

Parfois l’après-midi, Prosper se rendait chez son ministre et expédiait une fraction du courrier. À cinq heures, l’huissier avait la charge du verre d’eau de Vichy, même si l’attaché recevait dans cet instant une solliciteuse.