Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/206

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est encore toute jeune et toute verte, fleure encore la vie plus que les vieilles rentes. Il n’était riche que depuis quinze ans, peut-être douze ; le sourire de la réussite ne s’était pas encore figé en arrogance sur les lèvres de sa quarantaine. Il en était toujours à la période où le parvenu joue encore avec sa fraîche proie.

Il me charma : il me força d’être à mon avantage. Il me proposa de visiter son usine : sans nous arrêter aux tours, aux fraiseuses, aux décolleteuses, en passant vite, elle dura deux heures. Pas un mot d’Alice. Pas un mot de mon doctorat en droit. J’étais un noble étranger curieux d’industrie, un ambassadeur de quelque firme occulte. Mon vieux, en le quittant, je raffolais de lui.

Laffrey prétend que mon beau-père est une grande coquette et qu’il lui est impossible de ne pas plaire. Je me dis qu’il en eût peut-être agi de même avec le dernier balayeur de ses ateliers. C’est une âme pittoresque. Enfin, tu connais sa popularité.

Pendant un mois, je n’entendis parler de rien et je m’étais interdit de voir Alice. Quelle torture ! Par une sorte d’explosion à retardement l’énormité de la situation du père commençait maintenant à me foudroyer. Le seul souvenir des salles de machines, des dynamos, du bureau