Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/113

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

es notre fils préféré ; brise la houille dans les cavernes, sème le blé au grand soleil des champs, fabrique obscurément tes merveilles dans les usines, sois la vie de la nation, mais sans le savoir. Qu’on laisse à tes armes la colombe à côté du lion, car la Destinée les a liés l’un à l’autre, et quand l’oiseau blanc s’envolera, le jour sera proche où doit périr ta force ! »

Elle s’était émue un peu à la fin, en parlant ; sa voix fatiguée était graduellement retombée aux notes basses et sourdes, mais pas un de ses mots n’avait échappé à son auditoire silencieux et recueilli. Quand elle se tut et s’assit, en ramassant les papiers où ses yeux avaient cherché des points de repère au long du discours, il y eut dans l’Assemblée une hésitation dramatique. L’ovation des royalistes fut timide. Dès qu’il s’agissait de la souveraine, on était décontenancé ; il ne semblait pas décent de déchaîner un tapage brutal, et la frénésie un peu barbare du choc des mains paraissait hors de propos pour acclamer cette femme qui venait de tenir des centaines de personnes sous le charme, en prononçant des paroles à mi-voix. Ils avaient ce geste touchant d’applaudir, les mains levées vers elle, attitude inconsciente qui justifiait si bien le mot d’ « Idole » qu’avait em-