Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/116

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Une minute il demeura silencieux. Ses bras croisés ne se dénouèrent pas. Il allait parler sans gestes, sans effets. Un instant encore, il contempla ces yeux inquiets dardés sur lui par centaines. Puis sa voix s’éleva, jeune, puissante et grave :

— « Je demande, messieurs, une chose unique, c’est qu’un minimum de connaissances soit exigé de chaque enfant poméranien, avant que l’atelier, la mine ou les champs le prennent. Je demande, non point une culture impossible, mais quelques lumières, et ces connaissances préliminaires qui orienteront son jeune esprit vers des sphères inconnues aux illettrés. Je demande que, ne pouvant lui infuser la science, on mette entre ses mains l’outil pour l’acquérir, c’est-à-dire qu’on lui crée un cerveau avide de savoir et une intelligence aiguisée.

» Vous venez d’entendre contre mon projet de loi les arguments troublants d’une auguste bouche. Ils ne m’ont pas surpris, car je les avais prévus. J’accorde, messieurs, qu’une âme dégagée des limbes de l’ignorance, exposée toute nue aux âpretés de la vérité souffrira mille blessures, auxquelles les inconscients seraient invulnérables. Nous le savons tous, et si je songe à l’auditoire de lettrés, de savants, de penseurs, qui m’écoute, je sens