Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/140

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— Oui, c’est un peu vrai, et il y a du mouvement en ville, Hannah ?

Alors, la petite servante, mise en verve par la satisfaction visible de sa maîtresse, et aussi par une excitation personnelle plus imprécise, se laisse aller à une loquacité qu’on ne lui avait jamais connue. S’il y a du mouvement en ville ! Comment dira-t-elle cela ! C’est comme un repos du dimanche, et c’est en même temps comme une fête très solennelle, et encore même… pas une fête, une veille. Il n’y a ni joie, ni chants, ni belles toilettes dans la rue ; on dirait que les gens attendent quelque chose ; et on parle, on s’attroupe, on crie ; et c’est un bruit de querelles partout. Dans le faubourg, c’est affreux ce qu’elle a vu : devant la porte d’un cabaret, une large flaque de sang sur le pavé du trottoir ; quand on y songe ! Dire que c’est peut-être un homme tué au cours d’une rixe, qui a laissé là ce beau sang rouge ! Et les journaux qui ne suffisent pas, qu’on déchire en se les arrachant quand les vendeurs passent. Puis il y a encore ceci qu’Hannah hésitait à dire et qu’elle hasarde maintenant en devenant toute rouge : tous ces passants n’ont à la bouche que le nom de monsieur ; ils le crient très haut, ils se le renvoient dans leurs disputes ; quelques-uns le lancent avec