Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/158

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dans le courant qui la portait une bande d’adolescents aux jolis visages frais d’aristocrates, quinze peut-être en tout, n’ayant pas vingt ans, et dont pas un qui ne fût amoureux de sa belle souveraine. Ils chantaient, non point l’hymne national, ni de subversifs couplets, mais simplement la fameuse valse poméranienne, Béatrix, et la foule terrible, sous la mélodie de cet air lent, à deux temps, se sentit allégée et portée. Sur leur passage, s’évoquait nuageusement la figure de la Reine ; les mouchoirs palpitèrent en l’air comme des flammes blanches au-dessus de la multitude noire, et rien ne saurait dire ce qui se passait alors dans les cœurs.

Quand ils eurent atteint les quais, on se groupa derrière eux ; on les suivit, et le chant de la valse devint un chœur formidable. Tout le vieux loyalisme des Oldsburgeois, un moment oublié devant l’idéal républicain, se réveilla en folie. Madeleine suivait aussi de loin, dominée par cette pensée fixe qu’il y avait désormais par la ville deux cortèges ivres d’hostilité, et que, si le hasard de leurs méandres les amenait à un moment donné dans une même rue, il se passerait des scènes effroyables.

La cohorte des jeunes royalistes monta la rue