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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/184

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sa personnalité s’accusait de plus en plus. Et Madeleine, à qui revenait opiniâtrement la vision du pauvre jeune prince assassiné, se défendit d’en parler, dans le scrupule d’offenser cette grandeur à qui tout était permis et tout dû. Saltzen devinait ces choses et en éprouvait une sorte de joie trouble. Il vint dire adieu.

— Cher monsieur Saltzen, dînez donc avec nous, demanda Wartz.

— Mon cher ministre, répondit le docteur en souriant, pas aujourd’hui ; j’ai envie de donner ce soir à votre beau-père, un article sur vous, et je l’ai seulement construit en pensée.

Samuel n’insista pas. Il se mêlait à son amitié un sentiment pénible qui concernait Madeleine. Il les voyait, elle et lui, en constante recherche morale l’un de l’autre. C’était une souffrance d’amour-propre ; il soupçonnait que, malgré sa gloire, sa passion et sa jeunesse, sa femme trouvait moins en lui que dans le vieil ami ce qu’elle aimait. Il y avait entre elle et Saltzen comme une association d’esprits dont il était exclu, lui qu’aucun esprit ne rencontrait jamais absolument. Il préférait jouir du docteur hors de chez lui.

Une fois sur le quai du fleuve, où ne passaient plus que de muettes patrouilles de police, Saltzen