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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/201

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blée de la rue du Canal, propos entendus dans les bouges du faubourg, où il allait boire toutes les nuits avec les tisseurs. Il étalait complaisamment cette moisson riche sous les yeux du Maître, caressant le papier d’un doigt satisfait, lissant les fripures, graduant les importances. Mais Samuel ne regardait que son être physique, les rondeurs béates de son crâne à demi nu sous les poils blonds, ses tempes épaisses. L’œil, doux parfois, mobile toujours, n’avait jamais une expression mauvaise, mais ce point vif dans la prunelle qui indique le goût secret des gros plaisirs. Les paupières si, sensibles, si nerveuses, sans cesse vibrantes, semblaient, avec leurs cils pâles, prendre au vol le diapason de votre pensée pour y accorder le regard. Tel qu’il était, avec cet air vulgaire et fort, et cette moustache soignée qui était son talisman d’entrée dans son monde de cœurs habituel, Samuel se demandait s’il n’était pas capable de plaire à Hannah, l’enfant du peuple, à qui sa culture n’avait pas ôté le caractère de ses goûts plébéiens. Ce fut une inquiétude nouvelle ; la déchéance de la petite servante l’aurait désolé.

— Monsieur le ministre, ce qu’il nous faudrait maintenant, dit Auburger, c’est de l’argent, beaucoup d’argent.