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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/220

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avec lui qu’un même esprit, la déchéance de la Reine serait prononcée comme une simple formalité, et le nouveau gouvernement proclamé selon le rite ordinaire.

Assis à sa table de travail, les yeux sur ce monceau de dépêches, goûtant cette fois le triomphe absolu de son succès, il éprouvait la satisfaction d’un tâcheron puissant devant un ouvrage fini. Il avait mené à bien, avec art, avec force, l’œuvre à laquelle il s’était consacré. En dix jours il avait métamorphosé une nation ; et cela sans désordres. Le sang avait bien coulé un peu au début ; si peu !

Mais Madeleine l’avait dit dans un cri d’angoisse lucide : « Celui qui allume l’incendie n’est plus maître de l’éteindre. » À cette heure où, dans sa Solitude, l’homme d’État goûtait la joie de l’œuvre accomplie, à cette heure même, au plus profond de la ville, au plus intime, dans le quartier du Canal où la vie du peuple s’agglomère, dans celui du faubourg où grouille le monde des tisseurs — deux foyers d’humanité vive, remués d’incessants émois, où les étincelles tombent dans les esprits comme dans l’étoupe inflammable, — la nouvelle courait que les élections venaient d’élever au pouvoir le Peuple lui-même.

Conception naïve du régime républicain ! Grisés