Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/227

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seule force de passion qui vibrait dans tous les sens, jusqu’à la dernière molécule de ces corps.

La Bête monstrueuse se reforma au gré des lignes de la rue. Elle ne possédait pas plus de couleur que de forme, mais, au moment précis où elle se déroulait devant les torches arrêtées, on voyait se dessiner des personnes, des blouses, des camisoles blanches sur des gorges atrophiées, des grappes humaines, des enfants endormis sur des cous d’hommes, des sarraus de tisseuses, des figures hagardes, et, le plan de lumière traversé, ces rangées d’individus rentraient se noyer dans la masse, n’ayant laissé voir que leur visage en hypnose, et la tension pareille de leurs êtres, poussés tous par l’unique fougue d’ivresse. Les cris qui éclataient de toute part se fondaient en une clameur unique, prolongée, discordante, ininterrompue.

Une fois sur le quai, dès qu’apparut de loin le ministère, avec sa façade à triple développement, les gros festons des fenêtres, les colonnades des balcons, les cariatides du faîte, la Bête ne se connut plus ; elle lança un chant de délire, et par les ressauts de ses ondoiements, elle vint s’étaler, ivre et amoureuse, au pied des fenêtres de celui qu’elle voulait :

— Wa-a-a-artz ! Wa-a-a-artz !