Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/230

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même, l’entendirent, et éprouvèrent le froid moite de la peur.

La fenêtre se rouvrit, et Wartz revint s’y appuyer. De nouveau les mains battirent, la Bête satisfaite se calma et ne fit plus montre que de ses douceurs. Elle tendait les bras vers le maître. Mille choses flottaient en l’air signifiant le délire : des châles de femmes, des mouchoirs, des calottes d’artisans ; et des mains, des mains crasseuses, des mains tordues de vieux tisseurs, des mains pâles d’artisanes dégénérées, d’autres musclées et d’autres grasses, faisaient toutes le geste d’appel vers le demi-dieu.

Wartz demeurait immobile, les bras croisés, les joues blêmes.

Une voix isolée, dans le lointain, lança ces mots à pleine poitrine :

— Rue aux Juifs ! rue aux Juifs !

Ce cri anonyme agit sur la multitude comme un aiguillon, il la stimula d’une excitation qui la parcourut en tous sens.

Une clameur répondit :

— Rue aux Juifs !

Les foules n’ont qu’une âme.

Sous l’impulsion, pour une fois encore, la Bête se déplaça pesamment, s’écrasant sur soi-même en