Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/240

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d’animalité s’exhala des gorges. Sous le baldaquin pendant du plafond aux caissons de vieil or, c’était le lit, le lit de la Reine.

Ils étaient là plus de cent, muets, haletants, fouillant de regards allumés ce lit vide, ouvert pour la nuit. Les broderies du drap se repliaient sur la soie des couvertures défaites qui tombaient molles sur les colonnettes sculptées du bois. Un creux dans l’oreiller semblait l’empreinte d’une tête.

Une main osa s’avancer, chercher la tiédeur du matelas, une autre palpa les tapis et releva une pantoufle noire qu’elle brandit en l’air. Des pieds s’embarrassèrent dans de l’étoffe tombée à terre ; c’était une robe. On édifia, en la soulevant aux manches, une forme de femme, et, la forme une fois dessinée d’elle-même, par les plis faits au corps de celle qui les portait, un silence glaça ces hommes. Ils se vautrèrent à terre, la cherchant sous le lit, sous les tentures. Ils trouvèrent, tombé ici, un peigne d’écaille auquel tenait un cheveu ; ce fil de soie impalpable, qui frôla leurs doigts, les électrisa. Ils la sentaient dans cette chambre, invisible mais présente, comme une vision qui s’évanouit derrière vous et qu’on ne peut jamais sa retourner assez vite pour voir. Son mouchoir était