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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/284

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connaissait dans leurs intimités, ces aristocrates qu’à Orbach il avait observés et étudiés comme le peuvent les subalternes. D’un coup, il aurait renversé celui-ci, il l’aurait couché sous ses genoux, mis à merci, tué peut-être, et il frémissait de volupté en y pensant.

Tout cela dura une seconde. Il lui offrit sa carte.

— Vous m’en rendrez raison, monsieur, dit-il.

Le duc enleva en l’air, tout à coup, le pouce et l’index qu’il tendait. Le carton blanc tomba.

— Peuh ! votre carte… Je ne sais si je dois… Je suis gentilhomme…

Il ricanait. Son rire était à Wartz ce que sont aux bêtes de combat les dards dont on les stimule. Ce rire pouvait le pousser aux pires violences, et le duc de Hansegel courut là, tout un moment, un grand danger. Mais la religion de son œuvre avait trop appris à Samuel la discipline de toutes ses colères pour qu’elles ne fussent pas toujours maîtrisées d’avance ; il se baissa lentement, ramassa la carte sans hâte ni trouble. Il était redevenu le ministre de l’Intérieur, le calme homme d’État qui ne connaît ni colères, ni haines, ni passions, et il s’en alla, à peine méprisant.

Mais il venait de traverser une de ces heures qui pèsent plus que des années dans une vie. Comme