Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/301

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garder. Mais, pour le sens indistinct de sa crainte, Saltzen était caché dans cet inconnu et l’y attendait.

— Demain, Samuel, le docteur reviendra ; il ne soupçonne rien de ce qui s’est aujourd’hui passé de terrible en moi. Il m’apportera, selon la couleur du temps, sa mélancolie ou sa gaieté, il sera sentimental ou ironique, plaisant ou triste, mais toujours, au fond, je le sentirai m’aimer mystérieusement. Ne me dis pas qu’il a cinquante ans, que l’amour est ridicule à cet âge. Un amour comme le sien ne prête pas à rire ; il en souffre d’abord, et puis il croit si bien me le cacher ! Tout cela touche une femme. Comment veux-tu que tant d’affection me laisse indifférente ! Donc, il reviendra, et de nouveau je me trouverai devant lui ; est-ce que je sais, est-ce que je puis savoir ce que fera mon cœur à présent ? Je crois déjà le voir, il arrive, il entre, il vient s’asseoir près du feu ; il ne m’a rien dit, et déjà ses yeux m’aiment. Il comprend que tu m’es plus cher que tout ; il me parle de toi ; et je sens une émotion si triste dans sa voix ! Si j’ai quelque ennui léger, je le lui raconte ; alors il me sermonne, il me prêche, avec des mots qui ne sont que de lui, que de son cœur. Tu sais bien qu’il est fin et bon comme personne ; il cause des choses du jour, il m’instruit, et l’amour filtre entre tout cela comme un