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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/329

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jamais rien vu qui pût s’appeler grave. Les adversaires les plus acharnés même, ceux qui ont rêvé de tuer, deviennent toujours sur le terrain les plus maladroits, étant les plus impressionnables, et partant, les plus impressionnés.

Elle n’osait plus le regarder en face ; elle fuyait ses yeux, maintenant qu’elle le croyait instruit de sa tendance secrète vers lui, et qu’il lui avait fallu renoncer toute pudeur pour venir.

— Je comprends pourquoi vous me parlez de la sorte, dit-elle ; mais je ne m’y laisse pas prendre. Je connais la violence de Samuel, il sera terrible, si maître de lui, avec sa volonté qui est la chose la plus forte, la plus inflexible. Docteur, je meurs de frayeur ; au nom de votre affection pour moi…

Elle commençait à le troubler. Elle ne ressemblait plus à la tendre petite fille qu’il avait toujours vue, impulsive et réfléchie, livrant étourdiment, sans le savoir, rien qu’en ouvrant ses yeux gais, les profondes choses dormant en elle. Aujourd’hui elle était devenue si étrange, froide, renfermée, cachant la vérité d’elle-même jusqu’à éteindre le timbre de sa voix, jusqu’à emprisonner dans le manchon les gestes si francs de ses mains.

Et pourtant, l’avoir là, dans la demi-obscurité