Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/43

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les souvenirs du passé. Toute une procession de choses nuageuses passait devant elle ; des robes qu’elle avait eues, des paysages dans lesquels elle s’était promenée, des dentelles qu’elle avait brodées, mais tout cela l’éloignait de son sujet ; elle se reprit :

— Pauvre oncle Wilhelm ! Je lui ai fait un jour le chagrin de me fiancer à toi. Il n’a pas fait d’esclandre, souviens-t’en ; pas même le traditionnel voyage de l’amoureux déçu. Il est resté bien simplement ; il nous a vus nous aimer ; il a été bon et affectueux pour toi ; et c’est seulement quand nous sommes revenus de Hansen, après un mois, que tu m’as dit : « Comme il grisonne depuis quelque temps, ce pauvre docteur ; il devient tout à fait vieillard. » Te rappelles-tu ?

— Je me rappelle, fit Wartz.

— Il savait bien qu’il ne pouvait pas m’épouser, continua Madeleine. Il se contente, pour son lot, des petits mots d’amitié que je lui dis, et je t’assure, Sam, que c’est exquis cela pour une femme : sentir cette affection poétique qui ne s’est jamais traduite que par d’insaisissables preuves, deviner ce cœur que l’âge a fait si délicat… Un jour aussi, tu auras cinquante ans, et je ne respirerai plus que le parfum de ton esprit.