Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/72

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défiant, et une force intérieure nouvelle le rendait libre de dédaigner les collaborations étrangères. Il méditait quelque chose de très hardi à quoi il n’associerait aucun de ses amis.

Madeleine demanda tout à coup :

— Avez-vous vu Hannah ?

Cette jeune domestique était, pour son âme de maîtresse de maison, un sujet de scrupules continuels. Elle se reprochait de n’apprécier pas assez son service, sa vertu même, de s’agacer à sa vue sans compatir au chagrin délicat qui la minait. Cette animosité de deux jeunes femmes, si dissemblables de naissance et de nature, rivées l’une à l’autre par la commune vie d’intérieur, est quelque chose de très fréquent. Mais Samuel, avec sa belle poétique républicaine et ses idées générales, n’entendait rien à ces subtilités, tandis que l’oncle Wilhelm était fait pour écouter ces menues histoires de femmes ; il y prenait plaisir, il eût éprouvé, au besoin, ces minuscules passions féminines. Madeleine, pour ces problèmes de conscience, aimait cent fois mieux se confier à lui qu’à son mari.

— J’ai été un peu vive avec elle, ce matin, monsieur Saltzen, je l’ai fait pleurer.

— Comment donc vous y êtes-vous prise, madame ?