Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/73

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Madeleine regardait Wartz comme pour dire : « Vois si je suis peu coquette ! je vais dévoiler toute ma méchanceté. » Puis dévorée de ce besoin de confession, elle raconta tout.

— Voilà ; elle m’aidait à m’habiller, muette comme toujours ; et chaque fois qu’elle s’écartait de moi, c’étaient les mêmes soupirs de tristesse. Si vous saviez, docteur, comme c’est irritant ! J’aimerais mieux l’impertinence d’une servante quel ces gestes las, ces silences navrés, qui me disent très carrément : « Madame me martyrise, madame me fait mourir de chagrin ! » Est-ce ma faute, à moi, dites, docteur, si cette petite a manqué sa vie ? Je l’entoure de soins et d’égards, rien n’y fait, au contraire. Tout à coup, je n’ai pu me retenir, je me suis écriée : « Hannah, taisez-vous ; si vous voulez pleurer, allez dans votre chambre, et laissez-moi m’habiller seule. » Alors, elle a éclaté en sanglots. « On ne soupçonne pas ce que je souffre. m’a-t-elle dit ; mon esprit, mon pauvre esprit ! le sentir oublier tout comme cela ! Je ne sais plus une date de mon Histoire, et, quand monsieur parle d’une ville, à table, je ne saurais plus dire sur quel cours d’eau elle se trouve. » C’était bien mal, docteur, mais la voir effondrée sur un tabouret, les poings sur les yeux, toute convulsée, pour avoir