Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/93

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l’arrache si souvent, que je me suis posé la question : s’il devait sacrifier l’une de ces deux puissantes affections à l’autre, la mienne ou son fanatisme politique, ce serait… ce serait moi qui souffrirais.

Une émotion gagna Saltzen, en voyant les longues paupières un peu bridées, comme en un pli, de rire, se mouiller de larmes. Très bouleversé une minute, il ne sut que dire, songeant à tout autre chose qu’à Samuel. Puis il la consola, la rassura avec les mots qu’elle attendait, car ce besoin soudain de confidence venait bien moins d’une crainte véritable, que d’une impulsion d’intimité vers le docteur. Elle n’aurait point parlé de cette manière à son père, le journaliste Franz Furth, trop ignorant des subtilités sentimentales. pour la comprendre. Elle n’avait plus de mère, et son mari l’avait toujours un peu intimidée ; tandis qu’elle sentait le vieil ami en muet accord avec elle.

Moralement, leurs âmes étaient de niveau ; rien que de s’aborder, elles fusionnaient ensemble. Ce qui les séparait souvent, c’était cet amour inexprimé du vieil homme pour elle, mais, en sa présence, elle oubliait à demi le danger ; ou bien elle ne songeait plus qu’à la douceur de cette affection, en perdant de vue la malice. Puis, comme c’était