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Page:Yver - La Bergerie.djvu/104

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ture-là possède un tempérament organisé comme nul autre. Toute l’arithmétique, qui est la base de la musique, elle la tient dans son cerveau, et toute la passion, qui en est l’âme, elle l’a dans son âme, dans ses nerfs. Ce corps est presque un instrument ; mettez-le en contact avec n’importe quel clavier, les harmonies éclatent.

— Comme il l’aime ! » pensa Frédéric attendri.

L’humeur de Chapenel s’accentuait avec la chaleur que mettait à parler le maître de maison ; on voyait son sourcil noir se serrer, ses yeux se creuser ; à la fin, son regard se posa insoutenable sur Beaudry-Rogeas.

« Vous savez ce que je vous ai dit, mon cher ami, » prononça-t-il tranquillement.

Il n’ajouta pas un mot, et Beaudry-Rogeas se tut. Frédéric éprouvait, d’être en tiers ici, une gêne profonde. On eut beau parler d’autre chose ensuite, il avait l’esprit possédé de ce qui s’était passé sous ses yeux. Il lui vint tout à coup le sens de cette maîtrise inouie exercée par Chapenel sur celui auquel il était censé obéir. D’aimer une femme, l’autre n’avait même pas le droit, et quand il s’exaltait à louer une personne dont il était visiblement enthousiaste, son secrétaire lui imposait silence. On aurait cru voir un adolescent surveillé de près par un précepteur omnipo-