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Page:Yver - La Bergerie.djvu/105

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tent, qui eût eu la charge d’étouffer à leur éveil les plus tendres, les plus anodines passions.

Plusieurs jours se passèrent. La mystérieuse musicienne rentra dans l’ombre ; ni Chapenel ni Beaudry-Rogeas n’eurent plus à son sujet de différend, du moins devant Frédéric. Le roman hypothétique se faisait plus émouvant d’être plus imprécis. Ce que son maître avait perdu à ses yeux de n’être pas un grand homme, il le retrouvait d’être un homme sentimental. L’inconnue demeurait dans le vague, artiste vibrante et créatrice. Sur les entrefaites, Beaudry-Rogeas dictait au jeune homme ce billet :

« Ma Rosine chérie, je t’attends jeudi avec ta grand’mère, et je grille de pouvoir enfin t’embrasser. Prie grand’mère de m’apporter les quittances de loyer de la campagne, etc… »

Frédéric devait avoir l’imagination indiscutablement surexcitée, car il prit pour tracer la ligne : « Ma Rosine chérie, » qui ne comportait que les mots les plus courants d’un père à sa fille, une écriture remarquablement dénaturée. Naissance d’Europe, dont il recueillait toute cette journée les éléments dans Vita Karoli Magni — Chron. Eginhardi — devait l’occuper évidemment beaucoup moins que le genre de costume dont il se revêtirait le jeudi