Page:Yver - La Bergerie.djvu/158

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Leurs mains s’étreignirent, comme si Frédéric ne pouvait pas les voir. Les paupières de Camille palpitèrent. Elle dit :

« Prenons le chemin de traverse, nous verrons la façade. »

Et elle escalada le talus la première, comme pour se moquer de Frédéric dont les souliers vernis y glissaient.

« Ici, ce sont les pâturages, expliqua M. de Marcy. Les pâturages sont la grande affaire chez nous, nous sommes des éleveurs. »

Frédéric demanda :

« J’aurais voulu voir vos troupeaux. Vous avez des vaches de Jersey ? »

Le maître expliqua pourquoi elles étaient aux étables. On fumait actuellement les pâturages, et il montra, en effet, sur la nappe des champs, une sorte de tourbe dorée étalée en grumeaux desséchés sur l’herbe pâlie par l’hiver. Il en venait l’odeur des matières pourries, d’abord distillées dans les pluies, les brouillards imprégnants, et qui subissaient maintenant la cuisson lente des premiers soleils. L’herbe engraissée et victorieuse semblait soulever par endroits ce fumier et croître pardessus. Frédéric humait sans dégoût les relents tièdes de décomposition.

« Bientôt, dit M. de Marcy, j’aurai là l’herbe la plus forte, la plus touffue et la plus nourrissante. J’y mettrai successivement les vaches :