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Page:Yver - La Bergerie.djvu/170

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campagne, dont il avait ri, l’impressionnaient maintenant comme un rite religieux. On parlait à mi-voix dans la maison ; Camille ne bavardait ni ne travaillait plus ; on la trouvait accoudée aux fenêtres, rêvassant. Le ciel était d’un blanc gris très calme. Il y avait des frémissements immenses et sourds dans la campagne. Avril commençait.

La veille du mariage arriva. Elle fut d’un doux tragique sentimental. Tante d’Aubépine, très affairée, ne quittait pas son mouchoir, dont, entre deux ordres donnés, elle épongeait des larmes intarissables. Il tombait une petite pluie fine et tiède. Frédéric désœuvré errait dans la maison. « Où vas-tu ? » lui demandait au passage Mlle d’Aubépine. « Je monte », répondit-il évasivement. Et dans l’instant, à son tour, il rencontrait Camille « Où allez-vous ? » faisait-il. Elle lui disait : « Je descends. » Elle avait des airs étranges de ne penser à rien.

On apporta, dans une large caisse de bois léger, la robe de mariée. La bonne tante se fit aider de Frédéric pour la déballer avec mille soins. On l’étala comme une figure de soie, une blanche forme de jeune fille, sur le canapé de velours rouge où défaillirent les plis raides. Tous ces gestes, dans cette maison de famille, semblaient à Frédéric traditionnels, héréditaires et sains. Quelqu’un frappa à la porte. C’était M. de Marcy ; il entrait à pas de loup,