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Page:Yver - La Bergerie.djvu/173

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voyez-vous, grand frère, je devinais que marraine, tiraillée de scrupules, penchait à me faire un sort, à moi, la fille, plutôt qu’à lui le garçon, bien que cela lui brisât le cœur de voir la maison des Aubépine s’en aller en quenouille. Le notaire, lui, cherchait des biais ; il parlait de vendre les terres à mon profit et de laisser la maison au cousin. Comme ça lui faisait la part belle à ce malheureux, n’est-ce pas ? d’avoir quatre murs pour se nourrir ! Alors je me suis dit : « Comment, tu accepterais cela, toi, Camille, que cette maison qui est à Frédéric, qui était au père de Frédéric, à son grand-père, à son bisaïeul, à son trisaïeul, cette maison où il n’y a jamais eu que des Aubépine, dont les cheminées portent au fond du manteau des aubépines moulées en fonte, dont les vieilles chambres, là-haut, ont au dossier de leurs chaises des aubépines tapissées, où l’on respire l’air de la famille et le parfum de son nom, que cette maison te soit donnée à toi, l’étrangère légale, quand il y a là le descendant de toute la race qui serait déshérité ? Allons donc ! pour qui te prend-on ? » Oui, monsieur mon beau-frère, je me suis dit cela ; et voilà pourquoi j’apprends tant de choses qui ne me tentaient guère autrefois, et qui commencent à m’amuser. Je veux être une femme savante ; quand on est savant, on gagne toujours beaucoup d’argent, n’est-ce