Page:Yver - La Bergerie.djvu/179

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disait encore, la phrase de sa tante : « Si un jour venait où la chérie te plaise et que vous vous épousiez… »

Elle vint s’asseoir auprès de Frédéric qui ne lui parla pas. Il traversait le plus grand trouble. Il se jouait à lui-même cette comédie légèrement extravagante, qu’il était, avec sa jolie voisine blanche et rose, le héros de la fête ; que la Bergerie était en liesse parce qu’on les mariait demain ; et ces imaginations n’étaient pas sans exciter en lui des choses indiciblement sentimentales et décisives.

Au dîner on les plaça l’un auprès de l’autre. Le curé de Parisy, invité comme ami, était à droite de la châtelaine. Insidieusement, et comme si la question lui était indifférente, Frédéric s’informa du jeune ecclésiastique, de ses frères et sœurs ; à la vérité, les sœurs du curé lui importaient fort peu, mais il ne se souvenait pas sans un sensible désagrément d’un certain frère avec lequel Camille partageait autrefois ses gâteaux, et par lequel, au sortir de la grand’messe, elle se faisait renouer son soulier. Lui-même n’avait pas mesuré l’importance inavouée de sa curiosité. Mais lorsque Camille eut répondu que depuis l’an passé le frère unique de M. le curé s’était marié et avait quitté le pays, il se sentit rempli d’une satisfaction avertissante, qui éclaira d’une façon presque terrifiante ce sentiment de pro-