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Page:Yver - La Bergerie.djvu/190

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un à un devant ses yeux, surgissaient les meubles extravagants de cet atelier. Des tapisseries de laine pâle faisaient des murailles flottantes sur lesquelles se détachaient mal, en étirant leurs formes torses, les bronzes vert-de-gris de l’art nouveau. Les toiles du maître étaient absentes, seulement là-haut courait au-dessus des lambris une frise peinte, signée Chapenel, représentant une chaîne de cygnes et de faisans, dont la ligne de silhouettes suivie, ininterrompue, formait à l’abord un indéchiffrable ornement blanc et mordoré. Il y avait deux ans que le « pauvre Raphy » se reposait de ce travail. Le grand sujet de curiosité était par-dessus tout le poêle, monument de fonte travaillée, fouillée, assouplie à devenir comme la forme vivante d’une bête monstrueuse, une idole accroupie vomissant des flammes.

Frédéric, dont les yeux erraient de-ci, de-là, parmi ces meubles hétéroclites, revint au portrait et le contempla longtemps sans rien dire. Chapenel faisait, à coups légers de brosse, dans le noir de la robe, des taches hardies de couleur. Le regard de Frédéric allait se poser là-bas, au modèle dont l’épaule nue était comme transparente sous le jet de lumière :

« Reposez-vous un peu, madame, » décréta Chapenel qui continua de donner, comme à l’aventure, du bleu, du rose, dans la robe, dans les chairs, dans le fond.