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Page:Yver - La Bergerie.djvu/204

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« Comme elle est différente de ce que je l’avais jugée ! disait-il mentalement. Comme elle est bonne et peu affectée ; quelle amie discrète et douce elle doit être ! Qu’il doit faire bon se confier à un tel cœur de femme ! »

Littéralement, elle l’enthousiasmait. Et voilà qu’en la regardant mieux de profil, il reconnaissait en elle la photographie grisaille de la commode, l’idéal si frais de fillette sur lequel il avait échafaudé le roman de Rosine. Cette impénétrable jeune femme avait été cette exquise adolescente. I] y avait là quelque chose de mystérieux et d’adorable à penser.

Un grand silence se fit. Frédéric vit se lever et aller au piano un jeune homme inconnu ; il se demanda pourquoi Mme Ejelmar n’était pas à cette place-là. Il s’intéressait tant à elle, à l’amour de Beaudry-Rogeas, qu’il S’attrista de son absence comme d’une peine personnelle ; il eut d’elle une sollicitude tendre. Son ami paraissait préoccupé depuis longtemps ; serait-elle malade ?… Et voilà qu’en fouillant des yeux la masse des musiciens, il reconnaissait çà et là, et métamorphosés, les visages rencontrés au cours de ses visites. Ici la harpiste, en corsage de soie blanche, portant ce soir, sur sa chevelure admirablement coiffée, un opulent chapeau de velours bleu ciel, extravagant et la faisant jolie ; là, les chanteuses venues pour le chant de femmes inter-