Page:Yver - La Bergerie.djvu/205

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calé dans la symphonie de Ménessier. C’étaient deux ou trois de celles-là qu’il avait connues en peignoir et en bigoudis. Elles étaient poudrées et peintes ; de lourds chignons dorés leur tombaient à la nuque sous le chapeau ; leurs jupes, quand elles étaient assises, s’étalaient en large éventail de soie, gonflées de tous les falbalas bruissants du dessous. L’une d’elles lui sourit sous la voilette ; elle lui avait offert une cigarette l’autre jour. Et maintenant, l’originale mélodie de Ménessier, dessinée par les violons, capricieuse bacchanale respirant la folie, la fête, le plaisir échevelé, éclatait dans le salon trop étroit pour la contenir. Dès la seconde page, le jeune maître mécontent fit reprendre l’exécution. Debout et cambré, sa petite baguette au doigt, se possédant bien, il expliquait sa pensée en cette musique. Le plaisir parisien où viennent se consoler les blasés, les tristes, les blessés, les tendres, les déçus. Il y avait là une complexité redoutable à rendre. Il l’avait conçue magistralement ; pas une note qui n’eût un rôle et n’exprimât une nuance. On avait eu bien raison de dire que c’était là son petit chef-d’œuvre. Et de nouveau les harmonies partirent. Frédéric, redevenu l’enfant de la danseuse, se grisait à les entendre. Il vit Lydie revenir vers lui à pas glissés.