Page:Yver - La Bergerie.djvu/227

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deur. Camille n’a pas tout à fait dix-sept ans ; elle ne vous aime peut-être pas avec tout ce que le mot comporte strictement. Elle vous affectionne poétiquement, rêveusement, avec le sens débordant de dévouement qui est le fond de son petit cœur ; elle vous attend et elle souffre. Je sais qu’elle souffre. Pour la raison que vous connaissez déjà, elle continue de travailler cinq, six et même sept heures par jour. Elle épie chaque matin, avec une fièvre que ma femme a bien remarquée, le courrier qui porterait votre lettre, si vous écriviez plus souvent. Et vous ne venez pas. Vous ne viendrez peut-être jamais, et vous aurez ainsi brisé, le plus innocemment du monde, un cœur de femme. Je ne dis pas un cœur de petite fille, mais le cœur d’une vraie femme, de la plus tendre, de la meilleure, où les années n’ajouteront rien qui n’y soit aujourd’hui de pur, de bon et de puissant.

« Pardonnez-moi, mon cousin, de vous écrire aussi sévèrement ; mais j’aime trop cette enfant, et j’éprouve envers vous trop de sympathie, pour vous céler ce que je croyais devoir franchement vous dire. Si j’étais à votre place, je partirais très vite pour Parisy… »

Après le premier moment d’humeur que ne manque pas d’exciter chez un jeune homme l’admonestation logique d’un homme plus âgé, Frédéric se plongea vite dans cette imagi-