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Page:Yver - La Bergerie.djvu/245

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« Ma terre ! » prononça-t-il en lui-même, avec tout l’orgueil et toute la passion agricole des vieux Aubépine.

Il y verserait à pleines charretées le fumier gras et chaud qui vivifie ; il créerait, comme de Marcy, des maquettes de champs pour l’essai des engrais ; il ferait mordre à la charrue jusqu’au fin bord des fossés pour récolter une ligne d’épis de plus ; il accroîtrait ses troupeaux de vaches cauchoises, qui expriment, dans leur taille massive, plus de puissance et de richesse ; il bâtirait des écuries neuves où naîtraient des poulains fins et beaux. Et l’août venu, quand les moissons mûres feraient dans l’air leur bruit de soie froissée, tout seul, sans faucheurs ni gens de nulle espèce, comme un roi, il conduirait dans les sillons les cercles de la machine à couper le blé, debout sur le trépied de fer, maîtrisant ses chevaux cabrés, pendant que sa chérie le regarderait.

« Et l’hiver, lui disait-il en continuant son rêve tout haut, quand je serai très las de mon grand travail, nous passerons nos soirées tout seuls, sous la lampe, à nous dire des douceurs. Voulez-vous Camille ? »

Une lueur rouge naquit là-bas, avec un bruit de feuilles sèches qu’on foule. Une lanterne apparut, puis la mante à capuchon de Mlle d’Aubépine.

« Bonté divine ! mes enfants, où êtes-vous ?