Page:Yver - La Bergerie.djvu/265

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rustres, cette journée précieuse, ce jour unique où il pouvait revoir une dernière fois la plus étrange, la plus raffinée, la plus troublante des femmes. Il demeurait oisif dans ce grand salon où régnait déjà la nuit, se tordant les doigts d’un mécontentement de tout, d’un dégoût de la vie, d’une rage imprécise.

Le lendemain, dès l’aube, il retourna vers le potager, où, un livre à la main, le bon de Marcy lui faisait observer la feuille de la citrouille ou les plants d’asperges chevelus et roussis. Cet homme bien équilibré savait qu’il est une heure pour rêver de l’économie sociale et qu’il en est une autre pour le jardin potager. Mais le nerveux et impressionnable Frédéric apportait son souci, son trouble et son incertitude de tout, jusque dans la contemplation des légumes. Il en était bourrelé partout, aux champs, aux étables, à la laiterie.

« Si au fond, se disait-il parfois, c’était une créature affamée d’affection, d’abord séduite par le verbiage de Chapenel, et qui n’ayant trouvé en cet homme d’exception qu’un cerveau, s’inquiétât maintenant d’un cœur pour la comprendre ! Si cette belle et insaisissable Lydie, froide et impassible comme elle le paraît, souffrait sans qu’on le sût ! Si surtout elle avait un chagrin, l’ombre d’un chagrin dont je fusse cause !… »

Et Frédéric, les nos fiévreux, muet de