Page:Yver - La Bergerie.djvu/270

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« Cher maître, je suis toujours à vous, et dans trois jours serai chez vous. »

Il passa ce délai près de Camille à la rassurer le plus tendrement, le plus certainement. Elle avait de ce voyage une épouvante irraisonnée. « Paris va vous reprendre, disait-elle, vous allez revoir des choses… vous apprendrez à vous ennuyer ici. » Et tout ce qu’il lui disait de plus passionné, de plus rassurant, glissait sur sa désolation. Même quand à force de volonté elle eut retenu ses larmes, elle paraissait encore, pâlie, défaite, navrée comme elle était, une petite figure de douleur si meurtrie, que Frédéric affolé se demandait de quel bonheur surhumain il pourrait compenser plus tard ces jours de chagrin qu’il lui infligeait.

M. de Marcy le prit à part, il le regarda bien en face, de ses yeux intelligents et profonds, où l’on sentait le bon sens et un affinement excessif d’humanité, et il dit :

« Frédéric, souvenez-vous de ceci : sous aucun prétexte ne laissez s’augmenter le délai de six semaines qu’on vous demande. Paris vous séduit beaucoup, je sens tout ce que vous pensez. Quoi que vous rencontriez là-bas, quoi qu’il vous arrive et qu’on vous promette, sachez bien que vous ne trouveriez rien d’aussi bon que la petite âme qui vous attend et qui vous aime ici, rien d’aussi beau, d’aussi grand.