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Page:Yver - La Bergerie.djvu/274

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Et les discussions roulaient, interminables, sur ce point de savoir si l’on devrait ou non rattacher la personnalité intellectuelle et morale, qu’est l’actuelle Europe, au groupement religieux du moyen âge. La chose en soi ne déplaisait pas à Beaudry-Rogeas, mais ce fait que, selon sa propre expression, « Chapenel n’aimait pas les curés et les moines », pesait étrangement sur sa construction de Naissance d’Europe. Frédéric se sentait impuissant, avec toute sa logique, à renverser dans l’esprit de son collaborateur cette lourde influence de l’homme au foie malade, qui était aux eaux. Une semaine passa. Beaudry-Rogeas avait eu raison. Ils vivaient comme deux bénédictins. Lydie demeurait très renfermée dans sa chambre où elle lisait et travaillait aussi, disait-elle. Elle rappelait obscurément à Frédéric ces mystérieuses princesses carolingiennes, perverses, irrésistibles, et divinement belles dans leurs tuniques voluptueuses dont rêvent les vieux chroniqueurs. Et il se souvenait de la suave Imma, fille de Charlemagne, qui aima le jeune barbare Eginhard, secrétaire et confident du seigneur empereur. La légende charmante le hantait ; il adorait cette nuit de neige où la délicate et passionnée princesse, pour tromper les soupçons, emportant sur ses épaules l’amant qu’elle a feçu le soir, le dépose avant l’aurore à sa demeure, et le sauve