Page:Yver - La Bergerie.djvu/276

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Elle avait raison. La photographie était là, sur lui, il la sentait en cette minute avec le bonheur infini de défendre, de cacher, de refuser à tous, le cher petit visage inondé d’amour. Camille avait posé en songeant à lui, elle le lui avait dit et il l’aurait bien deviné dans son regard. Montrer cela à Lydie, maintenant, ce mystère de pure tendresse, cette photographie faite à Saint-Lô chez un artiste médiocre, ignorant des « procédés », qui n’avait pu donner à ces traits enfantins et velouteux le modelé de la grande beauté ? Montrer Camille, sa petite campagnarde aimée, dans sa rusticité simple qu’il trouvait belle, mais dont Lydie rirait peut-être à cause des cheveux coiffés sans art et de la robe de pensionnaire qui se devinait en dessin pâle sur le fond blanc ? Est-ce que c’était possible ?

« Sa sœur est déjà charmante, insinua sans hâte la douce fille ; ses yeux sont jolis et elle a cette distinction, cette paix extrême, la sévérité d’une madone des primitifs. Alors, songez, songez, Freddy, comme je voudrais connaître celle qui vous est si liée déjà, celle que vous aimez. Elle est belle, dites ?

— Elle me charme… voilà… »

Il allait ajouter « et je l’aime ». Il se retint. Il lui semblait que si Lydie concevait soudain cet amour tranquille, plus tendre que fou, plus doux que violent, plus fort qu’orageux,