Page:Yver - La Bergerie.djvu/55

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Frédéric riait et regardait à gauche la place vide ; il faudrait bien que le sauvageon finit par s’asseoir là. Et il l’attendait avec une sorte d’impatience qui lui faisait épier la marche de l’heure dans le gros cartel qu’enchâssait le panneau, les bruissements du jardin, l’avenue du parc sur laquelle la fenêtre s’ouvrait grande.

La silencieuse Laure coupait dans son assiette de petites bouchées d’oiseau. Il devait bien y avoir des pensées dans ce front lisse et large qu’un regard faisait rosir, mais personne : n’aurait pu les soupçonner. « C’est drôle, une jeune fille », observait Frédéric. Il avait eu sous les yeux, un jour, des livres d’hébreu qu’un de ses maîtres, au lycée Racine, lui avait montrés pour la reliure, et il s’était alors vaguement irrité de posséder entre ses mains tant d’idées souverainement intrigantes, qui s’offraient et se refusaient en même temps, dont il ne connaîtrait jamais le mystère. Il se souvenait de cette impression, devant ce jeune front illisible. Tante d’Aubépine établissait des généalogies des familles de Parisy et de Saint-Lô ; Frédéric, fort en appétit, maniait sa fourchette devant cet imbroglio de belles-sœurs ayant épousé le neveu issu d’un second mariage, et qui se trouvait germain avec cette belle madame de Chanterose, celle-là même dont la mère était une d’Aigremont…