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Page:Yver - La Bergerie.djvu/87

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Les feuillets en étaient jaunes et découpés par l’usage. Frédéric traduisait.

Quand ils entrèrent, à midi, dans la sombre salle à manger aux baies vastes, fermées de vitraux peints, Frédéric aperçut un homme couché plutôt qu’assis dans un fauteuil auprès du feu, et recouvert comme d’un rideau par un journal du matin qu’il tenait en l’air pour le lire. Le journal s’agita, se froissa, se plia, l’homme se redressa, se leva, et Frédéric curieux, intrigué, qui eut presque fait un pas de plus pour mieux voir l’être étrange, se sentit regardé soudain par des yeux qui le fouillèrent et le jugèrent en une seconde. Raphaël Chapenel paraissait à peine un peu plus que l’âge de Beaudry-Rogeas ; il était grand, large de buste, serré dans une redingote noire. Sa face osseuse, forte et rouge, avec une barbe qui, bien que rasée, reparaissait opiniâtre, drue et noire à fleur des joues, avait, sous le sourcil sombre, des yeux gris de fer au regard attardé, persistant, en continuelle analyse, semblait-il.

« Voici notre jeune manœuvre, Chapenel, » dit Beaudry-Rogeas.

Sans dire un mot, souriant seulement comme un augure, Chapenel tendit la main à Frédéric. En même temps, il se tournait vers le maître de maison pour lui lancer :

« Le ministère branle — que vous avais-je dit ? »