Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/23

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tives si pleines d’audace de la rue Le Peletier sur la rive droite. Le bon M. Le Guirec, son confrère quimpérois, le tenait pour un digne homme et le recommandait au notaire inquiet.

Mais à cette époque, l’amour fondit comme la foudre sur Hyacinthe Arbrissel.

Tout Quimper avait les yeux sur cette jeune gloire locale. Comme il avait réussi avec assez de bonheur le portrait de ses petites cousines de Châteaulin, un noble des environs lui commanda celui de sa propre fille. Et c’est ainsi qu’il fut appelé au château de Kerzambuc, près Quimperlé, pour le portrait de la plus jolie créature que ses jeunes yeux eussent encore contemplée, Annie de Kerzambuc, qui avait l’air d’une fée. Il la peignit se trouvant lui-même en état d’extase, cherchant toujours à exprimer cette mystérieuse lumière rose, celle du champ de pommiers révélée à ses douze ans dans une apothéose et qu’il croyait voir sourdre aujourd’hui de ce jeune visage comme d’une douce fontaine de couleurs.

Annie avait en effet un teint d’une délicatesse inimitable. Ses cheveux étaient emprisonnés dans une résille qui retombait sur le cou à la fine naissance du dos. Son petit buste d’enfant, bien écrasé par le corset, une blouse bleu clair l’enserrait, et de sa taille, que le peintre eût enfermée comme on aurait dit alors dans ses dix doigts, s’évasaient les volants d’une énorme crinoline à dessins roses sur fond blanc.

Mais de telles couleurs ne satisfaisaient pas Hyacinthe. Elles ne donnaient pas d’atmosphère à sa toile. Elles ne « chantaient pas ».