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Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/34

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vérité saisissante. Sous la façade au transept orné de sa ruse, on voyait littéralement frémir, respirer, bouger la place, ses arbres, ses passants, ses fiacres, ses omnibus, son immense souffle de vie. Hyacinthe Arbrissel, sidéré, absorbait cette vie, en recherchait les sources, l’analysait. Il lui semblait être au plus beau de ses jours. Chose bien particulière et qui eût dû lui inspirer quelque vergogne, le souvenir d’Annie ne s’imposait plus à lui que sous la forme de son portrait. Et il S’occupait moins à rechercher dans cette image mentale d’une image d’Annie la source de son tendre bonheur, qu’à y retrouver des analogies de procédés picturaux qui l’eussent apparenté à ce peintre soudain révélé. I] fallut que le marchand Bonassy l’arrachât à cette contemplation. « Qu’en dites-vous, mon jeune ami ? vint-il lui lancer avec un coup de poing au coude. — Que je n’oserai plus peindre, monsieur Bonassy. — Le voudriez-vous que votre pouce enfourcheraïit de lui-même la palette, mon cher. Mais il faudrait entrer dans la bataille, c’est-à-dire venir à Paris, faire partie du groupe des Batignolles, vous frotter à ces gaillards qui s’appellent Manet, Monet, Degas, Sisley, Renoir, m’apporter vos croûtes, et je vous prédis que l’exposition dont je me fais fort de vous organiser la possibilité dans ma galerie l’an prochain sera l’événement du printemps qui fera couler de l’encre. »