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Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/136

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cavatine de la dernière pièce. Elle balançait imperceptiblement la tête à la cadence des mesures, et sa main levée, avec ce brin de laine, en dessinait le rythme. Cet air gracieux et touchant, modulé par cette femme très simple qui était une reine, impressionna beaucoup Clara, qui passait ce soir par des émotions si étranges. Elle dit à son voisin :

— Mon élève, l’archiduchesse d’Oldsburg, ne ressemble pas à sa mère : c’est donc du roi qu’elle tiendrait son intellectualité, sa gravité, et même, si j’ose dire, cette majesté involontaire dont on ne peut lui en vouloir, tant on la sent innée et mitigée de grâce.

Le jeune homme frémit ; il prononça comme malgré lui :

— N’est-ce pas… vous n’avez pu la voir sans l’aimer ?

Clara voulut se reprendre :

— Je l’ai peu vue, mais j’ai fort bien senti son grand charme au demeurant, je ne possède aucune raison pour résister à la sympathie qu’elle m’inspire ; Son Altesse est une enfant.

— C’est une femme, reprit l’inconnu, mystérieusement.

— Je la plains de devoir être reine un jour et d’être, à dix-sept ans, une Altesse royale privée de toutes les joies de l’adolescence. Que ce métier d’Altesse semble rude, monsieur !