Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/143

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La savante acquiesça. Si l’on n’avait pas tous les appareils nécessaires, on enverrait un domestique les emprunter à l’amphithéâtre, en face. Wanda disait :

— J’ai tout appris théoriquement. Je ne connais rien des joies de l’expérimentation.

Alors la manipulation commença. Les deux jeunes femmes revêtirent des blouses, et Clara, en mouvements lents, aisés et précis, mena l’opération.

Elles se penchaient toutes deux pour suivre l’expérience. Cet appareil suranné de la vieille alchimie, la forme barbare de la cornue, le dessin cabalistique du tube de verre, cet aspect éternel que garde le mobilier de la science quand la science va toujours se transformant, rendait Wanda songeuse. Il y a dans la chimie une poésie spéciale qui dilue l’imagination et prédispose au rêve. Un corps allait naître sous les yeux de la « grande Hersberg ». On percevait un crépitement léger qui se produisait dans la cornue. Par la baie ogivale, l’œil enfilait, par delà l’immense place d’Armes, l’avenue de la Reine. Au loin, quelques cheminées d’usine pointaient par-delà le fleuve. À gauche, c’était la flèche de Saint-Wolfran qui s’élevait, un peu verdâtre, dans un ciel pâle d’hiver. Wanda disait :

— Serai-je reine, jamais ? Quand j’aperçois la cathédrale, ce n’est point les fastueuses cérémo-