Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/156

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hors des murs noirs. Et pendant que la cathédrale retenait aux sculptures de son porche des lambeaux déchirés de neige souple et molle, la flèche, la flèche sombre et fantastique des nuits sans lune, montait aujourd’hui blanche et floconneuse jusqu’aux altitudes allégées de l’air pur. Ce jour-là, les grilles géantes du palais s’ouvrirent sur la place d’armes pour livrer passage au cortège royal. C’étaient neuf calèches aux chevaux piaffants, auxquelles vint se joindre la petite escorte des quinze pages de la reine. Les troupes disséminées sur les chaussées de la place s’avancèrent pour encadrer la file des voitures à mesure qu’elle se formait. Il y avait là un détachement de cavalerie, un détachement de cuirassiers, un détachement de la Garde. Les uniformes verts des premiers mettaient une note austère dans le spectacle ; les cuirasses des seconds, étincelant superbement, annonçaient la gloire des souverains ; les grands manteaux blancs des Gardes du corps accentuaient l’aspect théâtral de cette marche royale. À toute vitesse les calèches s’engagèrent dans l’avenue de la Reine. Une foule élégante, qui stationnait là, sous les arbres givrés, depuis le matin, lançait des acclamations. On voyait luire dans des milliers de visages des yeux curieux ; on sentait la fièvre, le désir éperdu de violer le mystère royal, de pénétrer le secret des voitures, de voir Wolfran, Gemma, l’archi-duchesse. Mais les cavaliers maintenaient ce flot