Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/180

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cœurs sensibles veulent anéantir mon œuvre et disent Retirez cette loi, n’écoutez que votre cœur !

Son regard peu à peu revint à Clara qui l’écoutait très pâle. Ce beau visage anxieux levé sur lui apaisa ce coup d’exaltation, reste d’une ferveur juvénile que la maturité n’avait pas éteinte. Il se rassit et, d’une voix plus douce :

— Mademoiselle Hersberg, je vous jure que je désire être compris de vous ; vous êtes une loyale ennemie. Je sais que l’Union me déchire ; mais il me déplairait qu’une femme comme vous me méconnût. La grande Hersberg ne peut être le disciple aveugle d’un parti. Voulez-vous essayer de me comprendre ?

— Oui, Sire ; je souhaite même d’être convaincue.

— Eh ! bien, mademoiselle Hersberg, la Lithuanie, dont les destinées me sont confiées, ne se compose pas des trente mille tisseurs d’Oldsburg chers à l’Union. La Lithuanie est, à mes yeux, une personnalité morale que je dois faire toujours plus puissante, plus florissante, plus glorieuse. À côté des trente mille tisseurs dont les souffrances me navrent autant que vous, il y a sept millions d’agriculteurs que l’invasion des blés étrangers ruine. J’aime aussi les agriculteurs ; ils sont courageux, nécessaires et mènent une vie normale, saine, digne ; ils sont les meilleurs agents de la richesse nationale. Oh ! je sais ! les