Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/204

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comme le notait triomphalement l’Alliance, indiquait un état d’esprit général. Cette agression était une victoire pour l’Union. Et il ajoutait :

— Qu’en dites-vous, mademoiselle Hersberg ?

Elle répliqua, torturée :

— Si la doctrine de l’Union a inspiré cet attentat, c’est qu’elle a été mal interprétée, car elle n’est que fraternité, amour mutuel.

— Oh ! oh ! dit le duc, c’était donc l’amour du souverain que vous inculquiez aux tisseurs ? Clara se souvint des pamphlets, des caricatures injurieuses qui tapissaient les murailles au local du comité. Elle insista cependant :

— Nous n’avons jamais prêché la violence.

Sans perdre absolument le fil d’un entretien qui le passionnait, le roi, par urbanité, dut se rapprocher de son peintre. Froningue menait grand tapage avec le duc de Zoffern ; tous deux tonnaient contre les grévistes : le maréchal, en parlant, abattait régulièrement sur le marbre de la cheminée son poing velu et cordé ; sa mâchoire proéminait ; tout son vieux corps vibrait du désir de la répression. Le roi écoutait Zoffern sans le contredire. Il écoutait aussi le duc Bertie, qui disait à Clara :

— L’humanité est aisément haineuse. Elle l’est d’autant plus qu’on en descend l’échelle sociale. Vous croyiez répandre les semences de l’égalité : vous avez développé l’envie, et l’envie féroce. Quand on veut être le bienfaiteur du prolétariat,