Aller au contenu

Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/206

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

petit salon. Il n’y eut plus d’yeux que pour elle.

On apporta le thé. Les femmes se groupèrent autour de la reine. L’archiduchesse servit le roi, puis le grand maréchal qui ébranla toute la pièce en se précipitant pour prévenir cette attention ; sa confusion n’était pas jouée : il semblait vraiment souffrir, lui qui eût voulu mener le père comme un enfant, de recevoir des mains de la fille une tasse de thé. À la veille de prononcer au Parlement un discours d’orientation générale, il avait, avec Wolfran, des discussions tragiques dont il sortait écumant. Mais, en public, il se serait couché sur le passage du prince, en exemple de soumission fanatique.

Lorsque Wanda vint au duc Bertie, soutenant la soucoupe d’une main et le sucrier de l’autre, Clara remarqua une ride légère, une courte ride verticale, qui donnait au grand front de la jeune fille une singulière expression de souffrance et de dureté. Il leva les yeux vers elle en la remerciant, et Clara ne reconnut pas le duc persifleur, dur, métallique. Il était grave et comme confus. Il s’attardèrent l’un près de l’autre, parlant à mi-voix d’un livre prêté par l’Irlandais à l’Altesse. Celle-ci disait :

— Cette réfutation des doctrines de l’Union m’a beaucoup plu ; je n’avais jamais si bien compris l’esprit collectiviste. Je sais pourquoi vous me l’avez fait lire, duc ; c’est que vous redoutiez