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Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/216

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en somnambule, elle avait laissé naître et croître, sans y prendre garde, le mouvement qui aboutissait à la manifestation d’aujourd’hui. L’Union n’avait pu la tenir secrète. Les journaux l’avaient annoncée, la police en avait suivi la préparation, le cabinet royal l’avait réglementée, fixant l’heure où elle aurait lieu, la limite où elle s’arrêterait, le temps qui lui serait accordé. Mais Clara, l’âme de l’Union, l’amie passionnée de la foule, la femme qui ne possédait au monde que sa robe, après avoir tout donné pour le peuple, les yeux fixés sur son éternelle électrolyse, n’avait rien su. Quel réveil après la douceur du songe scientifique !

Silencieusement, l’archiduchesse passa dans une des pièces voisines, qui était le cabinet de son amie. Elle vit une liasse de journaux intacts, sous leur bande encore close. Elle les apporta au laboratoire où Clara demeurait béante devant la vitre. Mademoiselle Hersberg lui dit :

Je comprends, maintenant, je comprends. tout il les amène au roi dans leur misère.

— Mon amie, dit Wanda, quoi qu’il arrive, je reste près de vous.

Clara dit merci d’un air distrait, puis ouvrit le journal de l’Union. L’article de tête y était signé du jeune Conrad. Le poète y célébrait, dans une langue passionnée, la magnificence de l’acte d’aujourd’hui. Le peuple oubliant ses rancunes et l’iniquité de sa condition, confiant, épris