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Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/222

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humaine ; elle n’en démordrait plus. Kosor même eût été impuissant désormais à endiguer la marée. Tous se précipitaient aux grilles. C’était le roi qu’on voulait. On voulait qu’il apparût là, au balcon de la tourelle où l’on avait vu la reine le soir des noces royales. On n’était pas venu parler à des pierres. On exigeait que Wolfran fût le témoin ostensible de la muette représentation théâtrale. Et les admirables ferronneries, aux dorures éteintes, commençaient de s’ébranler sous la poussée.

— Mais que Sa Majesté se montre ! Qu’elle apaise le peuple ! murmurait Clara.

— Et après ? dit l’Altesse.

Il y eut une sonnerie de trompette qui déchira l’air. L’officier, commandant des troupes, poussa son cheval et dut faire une sommation, mais elle se perdit dans le murmure de tempête que soufflait l’émeute. Longeant les bâtiments latéraux du palais, des gardes blancs apparurent ; aussitôt, une détonation, que ne parvint pas à étouffer l’épouvantable clameur populaire, retentit, on vit une fumée légère, comme celle d’une cigarette. C’était un revolver qui venait de partir, « tout seul », fut-il expliqué plus tard, par les intéressés.

Ce fut la charge. Elle fut meurtrière. On devait évaluer plus tard à seize ou dix-sept mille le nombre des tisseurs entassés ce matin-là sur la place. Ce fut dans ce flot de chair humaine