Aller au contenu

Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/229

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

demi-- de l’extrême fatigue. Là-bas, au fond de l’immense pièce, la petite ampoule électrique, ressemblait à une étoile dans la nuit. Un peigne d’écaille tomba des lourds cheveux de la jeune femme ; à ce choc, des cordes semblèrent frissonner, il y eut un concert singulier, presque imperceptible, de plus de cent instruments vibrant ensemble. Le frémissement s’en éteignit lentement. Tout se tut. Le silence absolu régna dans cette chambre d’harmonies, comme dans une basilique. Le pâle visage penché de Clara endormie paraissait un visage de cire.

Soudain elle eut un sursaut, ses yeux s’ouvrirent, elle fut debout : la porte à deux battants s’était entre-bâillée, et une forme blanche hésitait sur le seuil. Wolfran V était là, en colonel des gardes blancs, tel qu’il lui était apparu la première fois, lors des fêtes de la Glace. Quand il l’aperçut, dressée devant sa stalle, la main sur l’accoudoir, dans la posture d’une femme qui accorde une audience, il se dirigea vers elle de son allure nonchalante et légèrement hautaine.

— Ah ! mademoiselle Hersberg, murmura-t-il quand il l’aborda.

Elle vit ses traits si douloureusement contractés, ses yeux, qui la pénétraient jusqu’à l’âme, si pleins de désolation, que les mots qu’elle avait préparés, elle les oublia soudain. Elle demeurait muette, illisible ; elle prit en tremblant la main que le souverain lui tendait. Il dit :