Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/238

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« Hélas ! pensa Clara, tout le monde la possède donc ! »

Et elle détourna la tête. La chambre meublée lui apparut dans la laideur de ses tentures de serge rouge. Le luxe du palais avait lentement instruit ses yeux. Elle souffrait d’entendre les paroles passionnées d’Ismaël dans ce décor trivial. Elle se pencha encore vers lui.

— Je suis presque riche, maintenant ; tu ne manqueras de rien, tu laisseras la cordonnerie, tu retourneras aux nobles travaux de notre bon maître.

— Le travail des mains est le plus noble de tous, dit orgueilleusement le révolutionnaire.

Clara expliquait à présent :

— Il m’eût été doux de te suivre, mais alors, quelles ressources aurions-nous eues ? L’humble place que je tiens au palais suffit à nos doubles besoins. Je reste pour te donner le signal du retour.

Alors il se résigna et franchit la porte derrière elle. Ils tâtonnèrent ensemble dans l’escalier obscur. Clara redoutait la rue et l’éventualité d’une scène que Wolfran n’eût point suffisamment prévue. Mais les ordres avaient été donnés minutieusement. Pas un officier de police ne fut aperçu. Haletante, elle poussa Ismaël dans le coupé en jetant au cocher le nom de la gare d’Allemagne. La voiture fila. Tous deux se taisaient. L’un était un automate inerte, l’autre