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Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/252

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roman, il demeurait écrasé sous la supériorité mystérieuse de ce petit homme frêle, fluet, que la nature avait dessiné en grisaille et qui, partout, en paraissant, émettait de la puissance. Le rapprochement entre ces deux êtres dissemblables, elle l’avait déjà fait plusieurs fois avec une arrière-pensée qui la troublait extrêmement. Aussi le duc la fit-il tressaillir quand il lui demanda en examinant du thermium :

— Et que tirez-vous de votre élève ? Son Altesse mord-elle à la chimie ?

Elle répondit que l’archiduchesse possédait un esprit d’une extraordinaire rapidité, qui précédait souvent les lenteurs de la démonstration.

— Son Altesse est douée des facultés les plus diverses, dit le duc, et cette forte mentalité qui la rend apte à de sévères études n’enlève rien à sa délicate féminité. Il n’est pas possible qu’il existe en Lithuanie d’adolescente plus parfaite, j’entends au point de vue des qualités de l’esprit et du cœur.

L’homme qui persiflait toujours avait dit ces mots gravement, et ses paroles semblaient. répondre à une secrète émotion.

— Je l’aime tendrement, fit Clara.

Le duc Bertie, sans rien ajouter, roula entre ses doigts une perle verte de thermium, comme pour en éprouver la mystérieuse température. Clara éteignit un fourneau à gaz sur lequel de l’eau bouillait en chantonnant dans un ballon de verre.